La Mairie

L’histoire d’un bâtiment au destin mouvementé, successivement asile de pauvres, école de filles, puis école mixte et enfin mairie


mairie-frontonQuelle est donc cette étrange Mairie, dont les anciens se souviennent encore comme de leur école communale et qui porte une croix à son sommet et sur son fronton l’inscription « Asile d’Aligre » surmonté d’un blason ? Asile, école ou Mairie ? En fait, elle fut les trois au fil d’une longue histoire.

Il faut savoir que dans les années 1840, Le Favril disposait d’une petite école mixte et d’une minuscule Mairie, toutes deux situées dans une modeste longère à l’entrée de la route du Crocq.
L’histoire du bâtiment actuel commence donc en 1847 à la mort du marquis Etienne Jean-François d’Aligre. Auparavant, cet homme immensément riche (sans doute une des dix plus grandes fortunes de France) avait légué à la commune du Favril la somme de 100 000 francs, ainsi que les revenus à recueillir sur divers bois et baliveaux. Connu pour sa très grande générosité, cet homme qui avait fondé de nombreux hospices et asiles de pauvres dans diverses régions, désirait honorer ainsi Le Favril, considéré comme le berceau de sa lignée ancestrale. Seules conditions quant à l’emploi de l’argent : « faire construire une Maison de sœurs pour les pauvres malades, avec annexe d’école pour les jeunes filles ». Et que « le lieu porte mon nom gravé sur une pierre placée à l’extérieur ».

Le temps de la construction

aligreL’affaire traîne ensuite quelques années, car certains membres de la famille d’Aligre contestent les dispositions concernant notamment le don des baliveaux. Le Favril plaide, va en appel, et, quand tout est finalement réglé, on hésite encore pour savoir où sera érigée cette construction. Certains tiennent pour la place de l’église. Mais finalement, considérant sa fonction d’école, on choisit l’emplacement actuel, estimé comme « le plus central par rapport à l’ensemble des hameaux ».
Mais là, ultime problème, la municipalité ne dispose d’aucun terrain. Heureusement la situation est rapidement débloquée par une nouvelle largesse des Aligre. Le marquis Pomereu d’Aligre fait don d’une pièce de terre d’un demi-hectare qu’il possédait à cet endroit.
Vient alors le temps des devis, souvent extraordinairement tatillons : « La pierre de taille proviendra des meilleures carrières de Berchères / Les briques et les carreaux employés proviendront des meilleures chaufourneries de Chartres / La chaux viendra de Senonches pour la chaux hydraulique et du pays pour l’ordinaire / Le ciment sera réduit en poudre fine provenant de tuiles et de briques pulvérisées / Tous les bois neufs seront de bonne nature, secs, sans nœuds vicieux, aubiers ni flaches de sciage / etc. ». Vue son importance, le chantier est divisé entre plusieurs entrepreneurs. L’entreprise Gibierge se charge du bâtiment principal pour la somme de 20 384 francs. Puis, viennent s’ajouter trois autres devis : pour le mur d’enceinte (3 280 francs), pour le nivellement du terrain et le creusement d’un puits (1 600 francs) et, enfin, pour la construction des communs – préau, cabinets, buanderie, etc. – (7 800 francs).
Finalement, la réception définitive des travaux a lieu en août 1869. La rentrée de septembre est assurée !

Le temps de l’Asile

À quoi ressemble donc cet asile ? Quatre pièces au rez-de-chaussée. La première est une « classe pour quarante jeunes filles ». Les trois autres abritent respectivement un parloir, une cuisine et une salle à manger. À l’étage, on trouve une lingerie et trois chambres destinées à deux sœurs de l’ordre de Saint-Paul, l’une assurant les soins aux malades et l’autre étant responsable de la classe.
À la rentrée de 1869, toutes les filles quittent donc la vieille école mixte de la route du Crocq qui, de ce fait, devient « école des garçons » et le restera jusqu’en 1923. Et les bonnes sœurs s’installent dans les meubles fournis par le Bureau de Bienfaisance, dont on possède encore l’inventaire détaillé. Ce qui nous permet de savoir qu’elles disposent, entre autres, de deux lits en fer, d’un Christ en plastique et de tous les ustensiles de cuisine et de ménage nécessaires.
Mais, l’inventaire donne également une vision assez précise de cette classe où se trouvent « 7 tables avec leurs bancs, 10 bancs portatifs, 2 tableaux noirs, 1 tableau du système métrique, 1 globe terrestre, 1 planisphère (en mauvais état), 4 cartes murales (d’Europe, de France, du département et de la Palestine) ». Et enfin, comme dans toutes les bonnes écoles chrétiennes, on y trouve aussi « 1 règlement des écoles, 1 crucifix, 1 statue de la Sainte Vierge et 1 statue de Saint Joseph ».

Le temps de l’école mixte et de la mairie

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Les archives de la mairie n’offrent que peu d’informations sur ce passage des bonnes sœurs. À peine relève-t-on quelques noms, comme celui de cette Sœur Marie-Ange, institutrice en 1903. Mais, on ignore tout de leur départ, sans doute consécutif à la loi de séparation de l’Église et de l’État en 1905.
C’est le temps de l’ultime changement. Après avoir obtenu l’autorisation des derniers descendants d’Aligre qui se disent « heureux que la fondation faite par notre arrière grand-père dans l’intérêt des pauvres puisse servir à éviter au Favril de nouvelles dépenses », le Conseil Municipal décide en avril 1923 d’y installer l’école mixte, le logement des maîtres et la Mairie. La délibération précise même que « la classe pourra recevoir le nombre total des enfants, que la mairie sera installée dans une pièce au premier étage et que les locaux destinés au logement des maîtres sont sains, suffisants et aérés ».
En fait, les enfants des deux sexes réunis y seront sans doute un peu à l’étroit, puisqu’en 1932 le bâtiment primitif sera augmenté d’une aile latérale pour y abriter de nouvelles classes et un logement supplémentaire (emplacements aujourd’hui occupés par la salle polyvalente). C’est cette situation qui perdurera jusqu’au début des années 80, quand l’école partira s’installer sur l’autre rive de l’Eure, à l’issue du regroupement pédagogique entre Le Favril et Pontgouin.

Désormais, le bâtiment entièrement rénové dans les années 2010 abrite définitivement la Mairie et le CCAS, ce lointain descendant du Bureau de Bienfaisance.

Le livre

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Le Favril, son Histoire et ses histoires

Stan Barets en collaboration avec Marcel Barré et Jean François Blondel

Edition : Mairie du Favril

Date de parution : 10/01/2016

Prix : 19,50 € (hors frais de port)

 

 


Pour vous procurer un exemplaire du livre, vous pouvez passer à la mairie pendant les horaires d’ouverture du secrétariat ou bien vous adressez un chèque de 22,70 (19,50 € + 3,20 €) à l’ordre du Trésor Public à la Mairie, avec vos coordonnées. 


La plus ancienne mention du Favril remonte à l’an 1105 (même si on trouve des éléments antérieurs comme un dolmen ou une ancienne voie romaine). A l’époque féodale, Le Favril est partagé entre son église et son château, bâti par une des plus puissantes familles de l’Ancien Régime. Mais lorsqu’éclate la Révolution, le village compte près d’un millier d’âmes qui vivent encore comme au Moyen-Âge, partagés entre l’exploitation des terres et des grandes forêts qui couvrent la commune.

Puis viennent les siècles de progrès et de bouleversements. On voit apparaître le chemin de fer, l’école et la mairie, les arrivées de l’eau et de l’électricité. Entre-temps, les deux guerres mondiales chamboulent tout et l’agriculture connaît sa grande mutation.
Aujourd’hui le village, entre Beauce et Perche, lutte pour préserver ses paysages et sa qualité de vie, dans un terroir authentique qui n’oublie pas son passé.

Ce sont les traces de ce passé ancien, retrouvé dans les archives, mais aussi de cette mémoire récente, recueillie auprès des témoignages de seniors, que raconte ce livre.

C’est Le Favril avec son Histoire et ses histoires…


Les auteurs :

Trois Favrilois, S. Barets, M. Barré et J.F. Blondel, ont mis en commun leur passion de l’écriture et de l’Histoire.
Le premier est un ancien éditeur et rédacteur en chef à la retraite. Le second, 91 ans, est à la fois le doyen du village et l’historien local. Enfin le dernier a déjà signé une dizaine d’ouvrages, notamment sur les cathédrales et les traditions anciennes.

En quelques chiffres
– Plus de 120 pages (format 18X25 cm env.)
– Une centaine d’illustrations et fac-similés de documents anciens
– Une cinquantaine de chapitres très courts pour éclairer les dates et monuments du passé
– Des dizaines de témoignages pour illustrer la vie quotidienne tout au long du XXe siècle.


L’église Saint Pierre

Modeste lieu de culte, bâti au milieu d’un minuscule bourg, l’église du Favril était là dès 1250. Huit siècles d’histoire…

 

Sous le règne de Saint Louis, Saint-Pierre du Favril était déjà là. C’est ce que confirme un registre du diocèse de Chartres, dressé en 1250, qui mentionne une église paroissiale dédiée à Saint-Pierre au Favril (Faverilium). Le texte ajoute qu’on y comptait un curé et 56 paroissiens.
(Attention, ce chiffre ne désigne sans doute que le nombre de chefs de famille. En ce cas, on peut imaginer de 200 à 250 personnes habitant au bourg ou aux environs immédiats de l’église.)*

Des origines à l’arrivée des Aligre

Construite en silex, pierres de grison et chaux ocre, cette chapelle primitive se limitait à l’actuelle nef. Soit un simple rectangle, d’environ huit mètres de large sur quinze de long, surmonté d’une voûte lambrissée et clos au niveau actuel de la chaire par un chevet plat sur lequel s’appuyait l’autel. Il n’y avait ni sacristie, ni l’avant-corps que l’on nomme localement « le caquetoire ». Dénuée de vitraux, l’église était seulement éclairée par cinq petites baies en plein cintre, simplement munies de verre ordinaire.
À l’issue des Guerres de religion, l’édifice est agrandi, par l’adjonction d’un chœur, plus large et plus haut que la nef. Au fond, le nouveau chevet en demi-cercle, éclairé par deux grandes fenêtres ogivales, permet de reculer le maître-autel et d’accroître le volume de l’église. Cet important chantier a lieu en 1586, comme le prouvent les deux inscriptions gravées sur la « poutre de gloire » de la nouvelle charpente. La première rappelle la mémoire du prêtre d’alors « Maistre Macé Hurtault, curé de Saint-Pierre du Favril 1586 » et l’autre porte la signature des charpentiers « M. Garnier et L. Gaillard 1586 ». Dès lors, l’édifice présente la silhouette étagée qu’on lui connaît aujourd’hui, et qui est si caractéristique des églises du Perche.

L’apport des Aligre

Quand Étienne II d’Aligre devient seigneur du Favril vers 1640, il considère Saint-Pierre comme son église paroissiale. Son blason armorié « aux trois soleils d’or » y apparait de très nombreuses fois et c’est là qu’on trouve son prétendu tombeau et celui de son épouse.
Après lui, tous ses descendants auront également à cœur d’embellir l’église. Au fil des ans, ils la dotent d’une litre seigneuriale, sans doute peinte lors du décès d’Etienne III d’Aligre en 1657, et d’une série de peintures murales très dégradées représentant les douze apôtres.
Mais le plus intéressant est certainement un très bel ensemble de statues anciennes.
Parmi celles-ci, une très rare représentation de la Trinité, où l’on voit Dieu le Père, présenté sous la forme d’un vieillard coiffé d’une tiare, surmonté de l’Esprit Saint, symbolisé par la colombe, et tenant entre ses mains le Christ en croix. Mais, on ne saurait négliger le Calvaire, situé à l’aplomb du chœur, qui montre le Christ en croix, entouré de l’apôtre Jean et de la Vierge Marie, selon une représentation que l’on retrouve dans de nombreuses églises du Perche.
La nef, quant à elle, offre d’autres belles statues typiques de l’art populaire. Signalons les effigies de Saint Sébastien, Sainte Catherine, Saint Evroult, Saint Pierre et Saint Nicolas. De tailles assez différentes, ces œuvres sont remarquables de fraîcheur et de naïveté. Loin des stéréotypes, la bonhomie des visages et la simplicité des attitudes sont le signe d’un art populaire particulièrement attachant.
Toutes ces statues en bois stuqué et peint, datées des 16e et 17e siècles, sont depuis 2010 inscrites sur l’Inventaire Supplémentaire des Objets Mobiliers Classés. Il en va de même pour un bel ensemble de vêtements liturgiques du 18e siècle. Ces chapes et chasubles sont également inscrites à l’I.S.O.M.C.

Une « modernisation » au 19e siècle

En 1876, l’église reçoit une nouvelle vague d’embellissements. Toujours grâce à la générosité des Aligre, on remplace les cloches disparues à la Révolution et surtout, on entreprend un vaste plan pour orner l’édifice de vitraux. Le projet est d’envergure, puisqu’on crée de nombreuses ouvertures nouvelles et que l’on agrandit celles déjà existantes.
Au total, on obtient un ensemble de vitraux remarquables par leurs couleurs et la qualité de leurs dessins. Réalisés en 1876 par les ateliers du Carmel du Mans, cet ensemble comporte six vitraux dédiés à la vie du Christ, et sept vitraux, dans le chœur, représentant la vie de Saint Pierre.

Et une toute récente découverte…

En 2008, une poignée de Favrilois prend conscience que l’église de leur village est en piteux état. L’édifice se dégrade rapidement. Un vitrail est cassé et des oiseaux ont fait leur nid au creux d’un immense tableau dont la toile déchirée pend lamentablement.

retable

Très vite l’attention de l’Association de sauvegarde est attirée par le cadre monumental de sa toile en piteux état (env. 3 m 50 X 2 m 50), relégué au fond de l’église. De même, ils remarquent deux très grandes boiseries accrochées sans raison près de l’escalier du clocher. Or, ces trois pièces, richement sculptées et ornées de volutes et d’angelots rehaussés d’or dans le goût baroque, sont de style identique. On comprend rapidement qu’il s’agit là des éléments épars d’un somptueux retable du 17e siècle. A l’origine, ils formaient un ensemble de panneaux, peints et ornés de motifs religieux, fixés verticalement derrière le maître-autel. Sans doute les avait-on démontés au moment du percement des nouveaux vitraux…
Consultés, les experts des Monuments Historiques confirment que « ce retable, par sa taille et sa somptuosité, mérite d’être réhabilité et remis en place, tel qu’il l’était originellement ». Le sauvetage est donc organisé.
Finalement, après trois années de restauration grâce aux efforts conjugués de l’Association, de la Mairie et des autorités du Patrimoine, le retable et son tableau, qui représente une « Assomption de la Vierge Marie », ont retrouvé en 2013 leur place originelle au-dessus du maître-autel et surtout leur splendeur d’antan.


L’ÉNIGME DU « VRAI-FAUX » TOMBEAU

Près de la chaire, une stèle de marbre noir, surmonté d’un imposant bas-relief de marbre blanc et accompagné de deux chérubins juchés sur des colonnes, rappelle la mémoire d’« Etienne d’Aligre, chancelier de France, mort le 11 octobre 1635, et Élisabeth le Chapellier, son épouse, morte le 4 octobre 1634 ».

Longtemps, on a donc cru que le seigneur du Favril, ancien garde des Sceaux de Louis XIII, était enseveli ici, dans l’église Saint-Pierre, près de son château de La Rivière. Le monument funéraire était même classé à l’Inventaire des Monuments Historiques depuis août 1906.
Pourtant le style ne « collait » pas et le portrait gravé d’Aligre ne ressemblait guère aux tableaux que l’on possède de lui.
Après une minutieuse enquête, l’explication apparut enfin.
En fait, ce bas-relief, sculpté en 1702 par Philippe Bertrand, ornait à l’origine la tombe d’un autre noble mort en 1700. Mais, saisi avec les autres biens nationaux au moment de la Révolution, son tombeau fut mis en vente. C’est alors, en 1819, que le marquis Etienne Jean-François d’Aligre (1770-1847) en fit l’acquisition.
Devenu Pair de France et doté d’une fortune considérable, ce marquis, descendant à la sixième génération d’Étienne II, le garde des Sceaux fondateur de sa lignée, tenait à honorer la mémoire de son aïeul. Après avoir repris possession du château de La Rivière il voulut lui offrir une sorte de « chapelle seigneuriale » au Favril. Pour cela, il n’eut plus qu’à faire installer ce tombeau dans l’église Saint-Pierre, après avoir pris soin de le « personnaliser » en y apposant les armoiries et le nom de son ancêtre. Sans toutefois aller jusqu’à altérer le visage figurant sur le médaillon d’origine…

Diaporama de l’inauguration

Diaporama Eglise Saint Pierre

Cartes postales

Le Favril

EN QUELQUES MOTS…

 favril-intro Trois villages français partagent le même nom. Ils s’appellent Le Favril. Le premier est entre Cambrai et Maubeuge, le second en Normandie et le troisième, celui qui nous intéresse, se trouve en Eure-et-Loir, à une trentaine de kilomètres à l’ouest de Chartres. 

Situation et environnement

Actuellement, « notre » Favril est situé en région Centre-Val de Loire. Mais, pour employer le vocabulaire des anciennes provinces, il se trouve exactement à la frontière entre les grandes plaines céréalières de la Beauce et les collines bocagères du Perche. Et comme tel, il en partage les deux caractéristiques opposées, en offrant un paysage mêlé de forêts et de champs.
Sur une superficie totale de 2 340 hectares, seul un millier d’hectares est consacré aux terres labourables, la majorité de sa surface étant couverte par les bois et l’importante forêt domaniale de Montécot. On comprend donc clairement que, pendant des siècles, la commune ait eu une double vocation agricole et forestière. En parodiant Sully, on pourrait dire que « Labourage et forestage ont été les deux mamelles du Favril » !

Évolution de la commune

La plus ancienne mention du nom Favril remonte à l’an 1100.
Pourtant, l’archéologie nous prouve que les ancêtres des Favrilois étaient déjà là. La présence d’un menhir en témoigne. Mais surtout le fait que le village soit bordé au nord par deux importantes voies de communication : la rivière Eure ainsi qu’une ancienne voie romaine.
Au fil des siècles, le village s’est lentement développé sous la forme d’une nébuleuse d’une trentaine de hameaux isolés, le cultivateur souhaitant toujours vivre au plus près de ses champs et le forestier de ses forêts. Sa superficie est ainsi devenue très étendue. À preuve, Le Favril couvre environ une fois et demie la taille de Chartres intra-muros (2 340 hectares contre seulement 1 685 pour Chartres).

Le village-nébuleuse

Si dans un premier temps, la nature des sols détermine les occupations et donc ce peuplement dispersé, on aurait pu imaginer que les deux grands pouvoirs de l’Ancien Régime, l’église et le château, auraient pu structurer le village. Il aurait normalement dû se créer un bourg, porteur de commerces et servant de centre à cette nébuleuse de hameaux. Il n’en a rien été.
Malgré la présence d’une église paroissiale, dès 1250, et d’un petit manoir seigneurial, le bourg proprement dit n’a jamais réuni plus d’une trentaine de feux et ne s’est jamais développé. Et lorsque le village est passé au 17e siècle sous la seigneurie de la puissante famille d’Aligre, celle-ci a préféré construire son château de La Rivière à l’écart du village. Même si Le Favril-église a donné son nom à l’ensemble de la commune, ce n’est qu’un hameau périphérique parmi les autres.
Après la Révolution, lorsqu’on institua les deux grands pouvoirs républicains que sont l’école et la Mairie, le problème du centre s’est trouvé à nouveau posé. Et il a été résolu en construisant un bâtiment mixte, abritant l’école et la Mairie, effectivement situé au centre de tous les hameaux, mais bâti strictement… au milieu de rien. En plein champ !
Finalement, Le Favril ressemble à un curieux système solaire où les planètes seraient des hameaux et le centre un unique bâtiment !

Les patrimoines

En dépit de cette carence structurelle, Le Favril possède d’intéressants éléments patrimoniaux.
Richement dotée par les Aligre, l’église conserve de beaux éléments qui rappellent les jolies églises du Perche. Les deux châteaux des Aligre, l’originel et un second tardivement construit au 19e siècle, méritent le coup d’œil. Enfin, plus subtilement, les fermes et l’habitat rural en général, qui datent souvent du 18e et du 19e siècle, ont conservé un charme certain, qui se combine agréablement avec un paysage fait de mares et de bois.

Favriloises et Favrilois

L’Histoire et l’étude du patrimoine ne sont rien, s’ils ne sont pas complétés par l’évocation des générations d’habitants qui ont lentement façonné ce terroir. Les archives communales et départementales, souvent très riches, ont ainsi permis d’éclairer de nombreux moments de la vie quotidienne d’antan.
Car la vie d’un village, c’est l’histoire de ses fêtes, de ses petits métiers et de ses traditions, mais aussi de ce long chemin qui mène vers la modernité. Se souvient-on encore de ce qui paraît si évident, comme l’arrivée de l’école publique, du chemin de fer, de l’électricité, des premières routes goudronnées, de l’eau courante, de la TSF ou aujourd’hui d’Internet ? N’oublie-t-on pas trop facilement ces grandes ruptures causées par les guerres ou la mécanisation de l’agriculture, qui ont totalement bouleversé le monde paysan ?


En un siècle, Le Favril, comme toutes les communes rurales, a plus évolué que durant tout le millénaire précédent. Par chance, nos grands anciens sont toujours là. C’est grâce à eux, grâce à leurs anecdotes, qu’a pu naître l’ouvrage Le Favril, qui en restitue à la fois la grande Histoire ainsi que le souvenir des anecdotes et des histoires de ceux qui ont fait le village. 

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D’OÙ VIENT CE NOM ?

L’origine du mot Favril est toujours l’objet d’un débat entre les spécialistes.
Pour les uns, il viendrait de faverolles ou « petite fèves », que l’on y aurait cultivées autrefois. À l’appui de cette thèse, on cite les nombreuses chartes du Moyen-âge, quand la langue n’était pas encore fixée, où le village est mentionné sous les noms de Faverillum, Faverilium, Le Fabvril, Le Faveril, puis, enfin Le Favril.
Mais, pour d’autres, il pourrait venir du latin fabrilis « la forge ». Faverillum désignerait alors « le lieu de la forge », ce qui serait confirmé par une très ancienne industrie artisanale du fer, due à la présence de limonite en sous-sol, et, en surface, de bois pour sa cuisson par le charbon de bois.

Les Grandes dates

L’Histoire du Favril, de la fin de la préhistoire à nos jours.

(Dans la liste ci-après, le signe (*) indique les mots ou les noms ayant une entrée dans l’ouvrage LE FAVRIL, son Histoire et ses Histoires


Néolithique : A la limite du Favril et de Pontgouin, un menhir, aujourd’hui couché rappelle la présence des hommes en ces lieux, trois ou quatre mille ans avant notre ère.

4e-1er siècle av. J.C. : Le Favril fait partie du territoire des Carnutes, une tribu gauloise que César décrit comme des plus belliqueuses, et dont la capitale, Autricum, deviendra plus tard Chartres.

1er siècle ap. J.C. : A la limite nord du Favril, les Gallo-Romains construisent une voie, aujourd’hui appelée chemin* de César. Cette ancienne voie romaine allait de Chartres à Bayeux, en passant par Rémalard et Sées.

858 : Les Vikings envahissent et pillent la ville de Chartres.

Vers 1100 : Plus ancienne mention du nom Favril (Favrilium) à propos d’un monastère établi au hameau* de Clémas.

Vers 1105 : Au bois de La Plesse, le comte du Perche, Rotrou III, fait bâtir une forteresse, la Motte-Rotrou*, pour marquer la limite de ses terres. Victime de la guerre de Cent Ans, cet ensemble, qui comporte également une chapelle, sera détruit au 16e siècle.

1219 : Première mention du Plessis*, la ferme fortifiée qui surplombe Pontgouin.

1228 : Plus ancienne mention du hameau* du Chesnay.

1239 : Une charte mentionne la présence de quatre moines au monastère de Clémas* (monasterium de Faveriliaco).

Vers 1250 : Un registre du diocèse de Chartres mentionne l’église Saint-Pierre* du Favril (Faverilium) qui réunit un curé* et 56 paroissiens.

Vers 1300 : Mention d’un moulin à vent (molendinus de Favrillo). Ce moulin dit de Saint-Pierre était sans doute situé sur la place de l’église. Il n’en subsiste aucun vestige.

1328 : Le comté du Perche, dont fait alors partie Le Favril, est intégré au domaine royal.

Vers 1430 : Louis de Couttes, seigneur du Plessis*, devient un des compagnons de Jeanne d’Arc.

Vers 1500 : Construction de la Grand’Maison*, plus ancienne demeure du Favril. Cette maison-forte (qui repose sur des éléments antérieurs) est alors le fief des seigneurs du Favril (famille de Courtalain* au 16e siècle, puis celle des Aligre* vers 1640.

Vers 1570 : Raoul Haligre, ancêtre de la lignée des Aligre*, acquiert le fief de La Rivière, au Favril, où ses descendants bâtiront plus tard leur château familial.

1581 : Le roi de Navarre, futur Henri IV, entre en possession de la « grande forêt » qui s’étend de Bois-Landry à Montécot, en passant par Champrond. Soit 4 100 hectares.

1586 : L’église Saint-Pierre* est agrandie par l’adjonction du chœur. (Inscription sur la poutre de gloire « M Garnier et L Gaillard 1586 »). L’église n’a alors que 7 fenêtres sans vitraux.

1589 : Accompagnant la conquête du trône par Henri de Navarre, futur Henri IV, le maréchal de Biron met le siège devant Pontgouin. Peu après Courville ayant pris le parti de la Ligue, le futur Henri IV s’empare en personne de la ville qu’il laisse piller par ses soldats. On imagine les répercussions dans la campagne environnante !

1616 : Les actes mentionnent Claude de Courtalain* avec le titre de « seigneur du Favril »

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1635 : Etienne d’Aligre*, seigneur du Favril, garde des Sceaux et chancelier de France, mort le 11 octobre 1635, est inhumé dans l’église*. (On découvrira plus tard qu’il s’agit d’un « faux tombeau » érigé « in memoriam » au 19e siècle). 

1643 : Mention de la ferme* de la Rousselière, toujours existante.

1645 : Date du plus ancien registre d’état-civil* encore conservé (à l’époque, il s’agissait de registres paroissiaux tenus par les curés)

1685 : Au printemps, le régiment de Feuquières campe entre Le Favril et Pontgouin pour construire l’écluse de Boizard et le début du canal de l’Eure*.

1710 : Première mention d’un maître d’école* exerçant au Favril. Un certain Michel Buthier.

1789 : Particulièrement visé en tant que président du Parlement, Etienne-François d’Aligre* est des premiers à choisir l’émigration avec son immense fortune.

1790 : Par décret du 15 janvier, l’Assemblée Nationale abolit les anciennes divisions en baillages, seigneuries et autres châtellenies. Désormais Le Favril fait partie du département d’Eure-et-Loir, district de Chasteaunef (aujourd’hui Châteauneuf en Thymerais), canton de Courville.

1793 : Jusqu’à cette date, le château de La Rivière* et son domaine faisaient partie du Favril. Par décision du maire de l’époque, cette portion de territoire est cédée à la commune de Pontgouin.

1794 : Démis de sa fonction par la Révolution, le dernier curé* du Favril reconnaît être le père de l’enfant né de sa servante.

1800 : La population atteint son maximum avec 823 habitants, lors du recensement*.

1801 : Louis Toussaint Fournier est élu maire* du Favril. Il restera en place 25 ans, établissant ainsi un record qui tient toujours…

1811 : De retour de Cherbourg, Napoléon 1er s’arrête successivement à La Loupe et à Courville. Mais il néglige Le Favril…

1843 : Ouverture de la première école* communale.

Vers 1850 : Michel de Pomereu, gendre du marquis d’Aligre*, agrandit et embellit le fastueux château des Vaux*, non loin du Favril.

1852 : En mai, inauguration de la ligne Paris-La Loupe. Grâce à la gare* de Pontgouin / Le Favril, le village est désormais relié à la capitale par le chemin de fer à vapeur.

1869 : Grâce à un legs d’Etienne Jean-François d’Aligre*, on inaugure « L’Asile d’Aligre ». A l’époque, il s’agit d’un hospice doublé d’une école de jeunes filles. Lors de la séparation de l’Eglise et de l’État, l’Asile deviendra la propriété du Bureau de Bienfaisance*. S’y installeront par la suite la mairie* et l’école* publique, agrandie d’une seconde classe en 1932.

1870 : Lors de la guerre de 1870*, des troupes prussiennes stationnent à trois reprises au Favril.

1875 : Les fenêtres de l’église Saint-Pierre* sont remaniées et agrandies afin d’installer des vitraux.

1894 : Institution d’un corps de pompiers* volontaires.

Vers 1900 : On compte jusqu’à onze cafés* répartis dans les divers hameaux du Favril.

1914-1918 : En quatre années, la guerre de 1914-18* emporte 27 Favrilois tués au combat (sur une population totale de 550 habitants).

1921 : Inauguration du Monuments aux Morts* pour honorer les Favrilois morts au combat entre août 1914 et novembre 1918.

1923 : La mairie* s’installe définitivement dans le bâtiment qui est actuellement le sien.

1926 : En octobre, la dernière marquise d’Aligre* vend en un seul lot l’ensemble de ses possessions en Eure-et-Loir et dans l’Orne.

1932 : Le 2 octobre, les édiles du Favril offrent un grand banquet républicain pour fêter l’arrivée de l’électricité* dans le village.

1940 : Les troupes allemandes entrent dans Chartres le 17 juin.

1944 : Après avoir libéré Nogent-le-Rotrou, le général de Gaulle entre dans Chartres le 23 août.

1960 : Désormais tous les hameaux* du Favril sont enfin alimentés en eau* courante.

1982 : Fermeture des deux dernières classes du Favril. Les écoliers sont désormais regroupés à Pontgouin.

1986 : Mise en place du C.C.A.S. qui remplace l’ancien Bureau de Bienfaisance*, lui-même créé aux lendemains de la Révolution.

2008 : Création du site Internet* officiel de la commune.

2013 : Redécouvert par hasard, un ancien retable avec tableau est restauré et remis en place dans l’église Saint-Pierre*.